[an error occurred while processing this directive]
Actus

« Invasion de migrants » : les 1.008 plaintes
contre SudPresse étaient fondées

25/10/2016

Une SudpresseL’émoi avait été énorme lorsque, le 24 février dernier, SudPresse annonçait en première page une « Invasion de migrants. La côte belge menacée ! » Illustré par une photo montrant quelques personnes, le titre était précédé de la mention « Espace Schengen suspendu ». Le lecteur était renvoyé en pages intérieures.
Le jour même, quelques plaintes arrivaient au CDJ, dénonçant une affirmation de SudPresse contraire à la vérité des faits et une présentation des migrants comme un danger. Ces plaintes furent suivies d’un millier d’autres pour les mêmes motifs, phénomène d’une ampleur que le CDJ n’avait jamais connue en cinq années d’existence
Cette Une valut au ministre des Médias, Jean-Claude Marcourt (PS) d’être interpellé deux semaines plus tard au parlement de la FWB. La question que posèrent alors les députés Doulkeridis (Ecolo) et Maroy (MR) s’inspirait manifestement d’une proposition déjà ancienne – et maintes fois répétée – de l’AJP : en matière d’aides à la presse, n’est-il pas temps d’appliquer le décret qui fait du respect de la déontologie une des conditions d’éligibilité ? Le ministre annonça alors la mise en place d’un groupe de travail « chargé de réfléchir à la création d’un meilleur système, en toute sérénité et non sous le coup de l’émotion ». Une réunion axée plus largement sur « l’accès à une information de qualité » fut organisée en son cabinet le 23 mars avec divers acteurs du secteur. Depuis lors, aucune autre initiative en la matière, mais il nous revient que le patron de Rossel aurait donné ordre à Sudpresse d’arrêter de flirter avec les lignes rouges….

Aucun fait établi

Dans son avis, le CDJ a constaté que la Une en question ne respectait pas la vérité et confondait faits et opinions : d’une part la Une ne renvoie à aucun fait établi puisqu’il n’y a ni invasion, ni menace ; d’autre part, en rendant compte (en page intérieure) – sans la créditer – de la crainte du ministre de l’Intérieur, elle présente comme un fait avéré ce qui n’est qu’une opinion. Le CDJ a également estimé que cette Une qui procédait par généralisation et dramatisation excessive stigmatisait particulièrement les migrants en les assimilant de manière générale à un danger. Il a en conséquence considéré que le média a manqué au principe de responsabilité sociale.
Le CDJ a souligné que le nombre de plaintes – 1.008 – n’avait aucune incidence particulière sur l’examen du dossier. En clair, qu’il n’y en eut qu’une ou mille ne devait rien changer à l’affaire. Mais pour les sociologues des médias, comme pour les directeurs commerciaux de la presse quotidienne, ce qui s’est passé là n’avait rien de banal. On imagine qu’au sommet du groupe Rossel, on n’a plus considéré que ce style de Une relevait simplement d’une forme moderne et dynamique de journalisme…

Deux autres plaintes

Le CDJ a par ailleurs déclaré fondée une plainte contre La Dernière Heure. Le quotidien avait consacré sa Une à l’augmentation des vols de cartes d’identité belges et à leur utilisation par les migrants et les terroristes. Ce faisant, il déformait les faits tels qu’ils étaient rapportés dans l’article en pages intérieures et assimilait de ce fait migrants et terroristes.
Une troisième plainte, contre La Meuse (Liège), portait sur la publication de la photo d’une personne à propos d’un jugement pour coups et blessures. Il s’agissait de la deuxième fois que La Meuse recourrait à cette photo pour laquelle le CDJ avait déjà remis un avis. Le CDJ a constaté que le média n’avait pas respecté la vie privée et le droit à l’image de la personne figurant sur la photo. Non seulement celle-ci est reconnaissable, en dépit du bandeau noir apposé sur ses yeux, mais il n’y avait pas non plus intérêt général à l’identifier.
J.F.Dt

Partagez sur