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Actus

Mehmet Koksal indésirable aux Etats-Unis !

11/08/2014

Mehmet KoksalSans la moindre explication, notre collègue Mehmet  Koksal (photo) , vice-président de l’AJP, s’est vu refuser l’accès aux Etats-Unis où il avait projeté de passer trois semaines et demi de vacances avec sa femme et son fils de cinq ans. Aucun, heureusement, n’était encore monté dans l’avion à Bruxelles le 29 juillet, date du départ. Mais outre une perte sèche de plusieurs milliers d’euros (avion, logements et frais divers), le journaliste vit maintenant avec une étiquette de « suspect » et une incertitude totale quant aux motifs et à la durée de cette exclusion.

Mehmet connaît bien les Etats-Unis. Il s’y est rendu à plusieurs reprises, et sans le moindre problème, pour divers reportages. Fin juin, il remplit par voie électronique la demande d’ESTA (Electronic System for Travel Authorization) pour les vacances familiales qui devaient être aussi, pour sa femme, le premier contact avec les USA. Le système ESTA accorde l’autorisation à sa femme et son fils, mais pas à lui. Contactée par ses soins, l’ambassade américaine à Bruxelles ignore les raisons de ce refus et se fait rassurante : « vous n’êtes pas le premier à qui ça arrive », « ça va s’arranger »… Mais on lui suggère, par précaution, de solliciter quand même un visa touristique. Voilà donc le journaliste, qui n’a pas de casier judiciaire et n’a jamais fait l’objet d’une arrestation, suspecté de terrorisme – que serait-ce d’autre ? – mais dans l’impossibilité de vérifier l’hypothèse, et donc de s’en défendre. Comble de l’ironie et de l’absurdité des normes de sécurité : une semaine après la sentence de l’ESTA, il était invité, comme chaque année, à la rupture du jeûne du ramadan… à la résidence privée de l’ambassadrice des Etats-Unis en Belgique.
Mehmet demande donc un visa touristique, ce qui lui vaut d’être longuement interrogé comme le veut la procédure. Le 29 juillet, ce visa se faisait toujours attendre. Mehmet hésite à faire quand même partir sa femme et son fils, qu’il rejoindrait plus tard. Deux heures avant le « checking » des bagages, il consulte ses mails. Nouvel e-mail de l’ESTA : il n’est toujours pas autorisé à entrer aux States, mais cette fois, le refus concerne aussi sa femme et son fils ! « Notre voyage est donc tombé à l’eau, avec la perte de plus de 4.000 euros et une terrible déception pour les miens, raconte Mehmet. Et de l’inquiétude aussi. « Pourquoi suis-je interdit ? A cause d’e-mails ou de messages comprenant le mot « terrorist » ? J’ai en effet évoqué plusieurs fois la campagne « Journalist are not terrorist » de la Fédération européenne des journalistes à laquelle je collabore. »

Notre collègue, qui a aussi la nationalité turque, a publié des analyses critiques à l’égard du pouvoir à Ankara, ce qui lui valut de solides inimitiés de milieux ultras à Bruxelles. Il a accompagné une délégation non-officielle de parlementaires à la prison de Silivri où sont détenus des journalistes pour motifs politiques. L’interdit américain est-il inspiré par ces faits ? En attendant d’avoir peut-être une réponse un jour, « on devient parano en se méfiant de tout et en risquant de pousser trop loin l’autocensure, ce qui est quand même un comble quand on travaille, comme je le fais à la FEJ, pour la liberté d’expression et de presse dans des pays d’Europe où elle est menacée. »
J.F.Dt

 

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