La Une de Sudpresse sur les migrants
interpelle le ministre des médias
La Une de SudPresse évoquant une « invasion de migrants » menaçant la côté belge n’a pas seulement suscité un millier de plaintes au CDJ, une plainte en justice (du site satirique et pastiche Nordpresse), et des débats dans les médias. Elle a aussi valu au ministre des Médias, Jean-Claude Marcourt (PS) d’être interpellé le 8 mars dernier au parlement de la FWB (1). La question qu’ont posée les députés Doulkeridis (Ecolo) et Maroy (MR) s’inspirait manifestement d’une proposition déjà ancienne – et maintes fois répétée – de l’AJP : en matière d’aides à la presse, n’est-il pas temps d’appliquer le décret qui fait du respect de la déontologie une des conditions d’éligibilité ? Dit autrement, lorsqu’un éditeur comme Sudpresse s’entête à ignorer la déontologie, ainsi qu’en témoignent les multiples plaintes déclarées fondées par le CDJ, ne faut-il pas le frapper au portefeuille en réduisant une part de l’argent public qui lui est attribué ? Pour 2015, Sudpresse a perçu 1,62 million d’euros au titre de cette aide directe Resterait évidemment à moduler la sanction en fonction de l’infraction. Lors des Etats généraux des médias d’information (2011-2013) l’AJP avait lancé à ce propos l’idée d’une aide fractionnée, divisée en autant de tranches qu’il y a de conditions à respecter. « On pourrait très bien, a suggéré Olivier Maroy dans son interpellation, imaginer d’objectiver la gravité des manquements à la déontologie par l’introduction d’indices attribués par le CDJ lui-même ou par l’introduction d’un curseur lié au nombre de plaintes fondées. »
Sortir du « tout ou rien »
Le ministre Marcourt, dans sa réponse, n’a pas rejeté le principe d’une application effective du décret et d’une prise en compte du respect de la déontologie. L’opposition aurait eu, sinon, beau jeu de lui remettre sous les yeux une des conclusions politiques des EGMI tirées par le parti socialiste. Il prônait alors « des sanctions graduées en cas de non-respect des critères » de l’aide à la presse. Mais le ministre ne s’est pas avancé pour autant à envisager déjà quelque chose de concret. « L’examen du respect de la condition relative au code de déontologie reste difficile à quantifier à défaut d’indicateurs permettant de graduer la gravité des manquements », a-t-il souligné. Faut-il prévoir une proportionnalité de la sanction et sortir du système binaire actuel (du tout ou rien) des aides, s’interrogeait ensuite Jean-Claude Marcourt ? On l’a écrit plus haut : son parti avait déjà répondu voici deux ans Pour l’immédiat, « nous allons mettre en place un groupe de travail chargé de réfléchir à la création d’un meilleur système, en toute sérénité et non sous le coup de l’émotion ». M.Marcourt a d’ailleurs joint rapidement le geste à la parole. Les acteurs du secteur ont été invités par courrier à le retrouver en son cabinet le 23 mars prochain pour débattre de « l’accès à une information de qualité ».
La publication des avis
Ces mêmes interpellations du 8 mars ont par ailleurs évoqué la question de la publication des avis du CDJ par les médias fautifs. Olivier Maroy et le ministre à sa suite ont rappelé la règle actuelle : mise en ligne d’un texte court du CDJ résumant son avis en page d’accueil du site du média pendant 48 heures, plus un lien (permanent) sous l’information incriminée, renvoyant à l’avis du CDJ. Jean-Claude Marcourt a alors annoncé avoir demandé au CDJ « d’examiner la possibilité de publier les décisions également sur le support original du média concerné. » Peut-être le ministre ne disposait-il pas d’une information complète à ce sujet ? Avant de mettre d’accord (en mai 2015) éditeurs et journalistes sur une règle de publication, le CDJ avait en effet longuement débattu de divers scénarios, y compris celui suggéré maintenant par M. Marcourt. Et rejeté alors par le CDJ, maître à bord de l’autorégulation en ces matières.
J.F.Dt
http://archive.pfwb.be/1000000020310d4