Lettre au président des Éditions de l’Avenir avant une décision capitale
Ce lundi 26 février, à midi, le conseil d’administration des Éditions de l’Avenir (ÉdA) se réunit à Bruxelles. Le choix de l’imprimerie qui devrait bientôt accueillir le journal L’Avenir figure à l’ordre du jour de cette réunion. En effet, « les rotatives de Corelio Printing, sur lesquelles votre quotidien est actuellement imprimé, ne seront plus en capacité de le faire » écrit Lavenir.net. Le choix de l’imprimerie ne relève pas d’une simple décision économique. Si l’option « Rossel » était retenue contre toute attente, la fusion entre les EdA et Rossel semblerait inéluctable.
Le personnel de L’Avenir ne veut pas de cette option-là. Il l’a écrit dans un courrier électronique adressé à Pol Heyse, président du CA des EdA. Les délégués syndicaux et des rédactions rappellent, dans la lettre qu’on lira ci-dessous, les raisons pour choisir l’autre scénario (Europrinter).
Par ailleurs, le CA devrait également entériner le départ de l’administrateur-délégué, Éric Schonbrodt. « Celui-ci était en difficulté depuis plusieurs mois et n’avait plus la confiance de l’actionnaire et du président du conseil d’administration », lit-on sur le site du quotidien. Éric Schonbrodt pourrait être remplacé par Jos Donvil, l’actuel responsable du pôle Télécom de Nethys et patron de VOO.
Pol Heyse a réagi aux dernières réactions à propos du futur des EdA en soulignant que :
1. Mr. Éric Schonbrodt, administrateur-délégué des Éditions de l’Avenir, a demandé à quitter l’entreprise et un accord dans ce sens a été trouvé avec lui.
2. Contrairement à ce qui est diffusé sur certains sites, aucune décision relative à l’impression du journal L’Avenir ne sera prise ce lundi, les négociations étant toujours en cours.
3. Il est consternant de constater que des décisions économiques au sein d’une entreprise se retrouvent ainsi étalées sur la place publique.
La lettre à Pol Heyse
Monsieur le Président,
Il nous revient qu’une réunion du conseil d’administration des Éditions de l’Avenir est programmée pour ce lundi. La nouvelle nous réjouit puisque, lorsque nous vous avions rencontré en compagnie de M. Donvil, en janvier dernier, nous vous avions expliqué que l’absence de réunions du conseil d’administration, depuis juillet dernier, ne manquait pas de nous inquiéter, ce à quoi vous nous aviez répondu que nombre de décisions pouvaient se prendre de manière rapide, sans nécessairement réunir le conseil.
C’est donc que des décisions importantes vont être prises ce lundi, au premier rang desquelles, si nous sommes bien informés, le choix du futur centre d’impression du journal.
C’est une décision, vous le savez, que nous attendons avec impatience. Lorsque nous vous avions rencontré, nous ne vous avions pas caché que nous l’espérions à bref délai, et que nous nous ralliions au choix du comité exécutif du journal : le groupe Europrinter à Charleroi, à qui des conditions particulières et des garanties financières ont été demandées, et qui les a fournies. En nous annonçant une décision imminente, vous nous aviez pour votre part déclaré que ce choix était aussi le vôtre.
Nous voulons croire que le conseil d’administration, ce lundi, ratifiera ce choix, qui a été effectué en toute transparence.
Le contrat d’impression avec Europrinter ne lie en effet formellement le groupe que pour une durée de deux ans : si c’est le choix que le conseil d’administration effectue, il ne s’agit donc pas d’un choix stratégique qui engagerait le groupe à long terme.
L’autre avantage, essentiel, du choix d’Europrinter, c’est qu’il permet au journal de conserver son format actuel. Les enquêtes effectuées auprès de nos lecteurs nous ont en effet appris qu’ils étaient fort attachés à ce format de lecture, et le taux exceptionnellement élevé d’abonnés que notre groupe affiche nous oblige à être très attentifs à cet élément. Un format plus petit, à l’inverse, heurterait de front notre public.
Europrinter, enfin, est prêt à assurer l’impression des journaux du groupe avant la fin de cette année : l’économie substantielle que cette disponibilité permet est un autre élément qui nous conforte dans la pertinence du choix effectué par la direction du groupe.
Monsieur le Président,
Si le choix unanime du comité exécutif des Éditions de l’Avenir, approuvé par les représentants du personnel, ne devait pas être celui du groupe Europrinter, la seule alternative envisageable serait l’imprimerie du groupe Rossel à Nivelles.
Pareil choix se heurterait, à l’inverse, à des problèmes non seulement de format, mais aussi de distribution : il nous est connu que la distribution des titres du groupe Rossel souffre déjà de nombreux retards ; y ajouter les journaux du groupe « L’Avenir » ne ferait qu’amplifier ce problème. Il nous est revenu également de très bonne source que la saturation des rotatives de Rossel rendrait difficile l’insertion de l’impression des quotidiens de « L’Avenir »
Il y a quelques semaines, par ailleurs, M. Marchand, administrateur-délégué du groupe Rossel avait fait savoir que le retard mis par les Éditions de l’Avenir dans le choix de son futur groupe d’impression l’empêcherait d’assurer l’impression des journaux du groupe au début janvier 2019, comme cela était planifié. Cela signifiera donc que nos journaux devraient, pendant plusieurs mois, continuer à être imprimés sur les rotatives de Corelio Printing, mais dans des conditions plus drastiques, et toujours à un prix nettement plus élevé que celui annoncé par Europrinter, voire par Rossel.
Confier au centre d’impression du groupe Rossel l’impression des journaux du groupe revient par ailleurs à placer nos quotidiens sous le contrôle complet de leur principal concurrent, ce qui affaiblira nécessairement leur position concurrentielle.
L’impression de nos journaux au centre d’impression du groupe Rossel signifierait enfin, et surtout, la fusion inéluctable, à terme des Éditions de l’Avenir et du groupe Sud-Presse. C’est-à-dire non seulement la fusion de deux groupes de presse dont les pratiques journalistiques diffèrent fondamentalement, mais aussi, et surtout, sous réserve de l’approbation, très difficile à imaginer, du conseil de la concurrence, une atteinte grave au pluralisme de la presse et à la pluralité des opinions en Wallonie.
Monsieur le Président,
Il nous paraissait urgent de vous tenir informés, ainsi que les administratrices et les administrateurs du groupe, de ces considérations, afin que votre décision sur le centre d’impression prenne en compte l’intérêt bien compris d’un groupe auquel, nous vous l’avons dit lors de notre rencontre, le personnel des Éditions de l’Avenir est profondément attaché. Et qui est toujours prêt à se mobiliser pour le défendre.
Veuillez agréer, Monsieur le président, l’expression de nos salutations distinguées
Les délégués (CNE et SETCa) du personnel et de la rédaction (AJP et Société des Journalistes) des Éditions de l’Avenir.