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De Morgen se mobilise pour Kambash

13/03/2008

Photo : Yaqub Ibrahimi interviewé par Koen Vidal (De Morgen)

Sayed Pervez Kambash est un jeune journaliste afghan qui n’aura commis qu’un
seul crime aux yeux de la justice de son pays : distribuer sur un campus universitaire des articles relatifs à l’égalité entre les sexes (une interprétation de l’islam sur la condition des femmes), qu’il avait
téléchargés sur un site internet.

Le 23 janvier dernier, à l’issue d’un procès qui aura duré quatre minutes seulement, il est condamné à la peine
de mort. Très vite, des vagues de proinfos_AJPation se font jour un peu partout en Europe : l’organisation Reporters sans frontières invite, sur son site, à interpeller l’ambassadeur de France en Afghanistan ; le collectif Ni putes ni soumises a lui aussi lancé une pétition en ligne ; tout comme le quotidien britannique The
Independant
qui a déjà récolté plus de 70.000 signatures.

En Belgique, le quotidien De Morgen se mobilise pour la libération du journaliste. Le 12 mars, le journal flamand a organisé une soirée de soutien au KVS (théâtre royal flamand – Bruxelles) avec notamment pour invité le frère aîné de Pervez Kambash, Yaqub Ibrahimi, également journaliste en Afghanistan. Lui et son frère ont publié plusieurs articles critiquant le pouvoir en place tant sur le plan national que local et il voit dans cette sentence une nouvelle tentative d’intimidation. « Mon frère partage sa cellule avec de vrais criminels, explique-t-il. Et, aujourd’hui, son destin est entre les mains de la Cour suprême. Si celle-ci confirme le jugement, il ne nous restera que la grâce présidentielle comme seul recours. »

Yaqub Ibrahimi s’est dit heureux de l’opportunité de parler des libertés de la presse et d’expression, quasi inexistantes, dans son pays. « A plusieurs reprises, j’ai dû faire face à des menaces : appels téléphoniques, visites à mon domicile…
Les groupes fondamentalistes de mon pays n’osent pas aller plus loin car je travaille avec plusieurs médias internationaux. C’est pourquoi ils ont visé mon frère, qui travaille en presse locale et qui est aussi étudiant en journalisme
. » « Si on veut aller à l’encontre du régime afghan, poursuit-il, on est condamné à mort. Nous sommes encore au Moyen-âge ! Les forces internationales présentes dans mon pays ne changent rien à la situation. Elles sont là pour défendre la démocratie mais, malgré cela, un journaliste a été condamné pour une activité qui paraît normale dans vos pays. »

Et de s’en prendre avec virulence aux groupes fondamentalistes qui « veulent tout arrêter : la liberté d’expression et la démocratie« . D’où l’importance d’une mobilisation européenne forte, « pour faire pression sur le pouvoir en place », rappelant que les premières voix à soutenir son frère sont parties d’Afghanistan : celles de femmes, d’universitaires. Si son frère venait à être libéré, Yaqub Ibrahimi sait qu’il ne serait pas pour autant en sécurité. « Lorsqu’on est journaliste indépendant dans un pays fondamentaliste comme l’Afghanistan, on accepte de prendre ce risque. »

Laurence Dierickx

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